Subventions publiques et financement participatif pour acheter la yourte scolaire de Mellionnec (22)
Thématique(s): Écoles et périscolaire - Équipements publics
Infos pratiques
Adhérent depuis 2007
Maire : Pïerre-Yves Daniel
Adresse : Le Bourg, 22110 Mellionnec
Téléphone : 02 96 24 23 26
Nbre d’habitants : 424
Superficie : 24 km²
Intercommunalité : Kreiz-Breizh
www.mellionnec.fr
Contact BRUDED : Cécile Jamoneau
Autres expériences de Mellionnec
Connaissant une croissance démographique importante, l’école de Mellionnec obtient un troisième poste d’enseignant à la rentrée 2023. Ne disposant pas des locaux nécessaires, les élèves investissent la salle des fêtes pendant que les élus cherchent une solution écologique et pas chère : ce sera une yourte pour laquelle un financement participatif est lancé en complément des subventions publiques.
A l’instar du territoire du Kreiz Breizh auquel elle appartient, la commune de Mellionnec – 460 habitants – a connu un déclin démographique important (elle comptait 1400 habitants il y a un siècle). Cependant, elle vit depuis ces dernières années un regain démographique et doit adapter ces services publics en conséquence.
Une troisième enseignant mais pas de troisième salle de classe
En 2015, l’école Maria-Chevalier comportait deux classes pour vingt-sept enfants. Elus et parents d’élèves avaient dû se mobiliser pour éviter sa fermeture. Sept ans plus tard, soixante-quatre enfants sont à l’appel, au point d’obtenir un troisième poste d’enseignant. Malheureusement, la problématique se situe désormais au niveau des locaux : l’école ne possède que deux salles de classe.
La troisième classe est donc installée à titre provisoire dans la salle des fêtes. Cette solution n’est pas satisfaisante, les locaux n’étant pas adaptés à cet usage, d’autant plus qu’ils sont vieillissants et nécessitent des travaux de rénovation et d’amélioration énergétique urgemment. Les couts d’électricité pour chauffer en continu la classe de 100m2 sont exponentiels. De plus, elle est mobilisée et ne peut plus être utilisée pour les événements associatifs de la commune. Les élus explorent diverses possibilités : la location d’un préfabriqué à 18 000 € annuels, une classe modulaire à 120 000 € et une extension entre 200 et 300 000 €. Aucune ne satisfait par son prix, son confort d’usage et/ou son délai de réalisation.
S’inspirant d’autres communes dans des situations analogues – Plounéour-Brignogan-Plages (29), Lauzach (56) ou encore Treffieux (44) – ils s’intéressent à la possibilité d’installer une yourte. Rapidement, ils se rendent compte que cette solution coche toutes les cases : rapidité de mise en œuvre, conformité réglementaire, confort, respect de l’environnement, prix modéré, avec la possibilité éventuellement de réorienter son usage si les besoins évoluent.
Nous avons opté pour la solution correspondant aux critères les plus sûrs, les plus rapides, les plus confortables, les plus économiques, écologiques, les moins chères et produites localement : une yourte !
Pierre-Yves Daniel, maire
Convaincre les financeurs
Les premières discussions début 2024 avec un constructeur isérois la Yourte Alpine – travaillant avec des matériaux biosourcés – chiffrent le projet à 95 000 € tout compris. Mais contraintes budgétaires obligent, la commune s’oriente vers la Yourte Française moins coûteuse, mais toujours conforme à la RE 2020, avec des aménagements réalisés en régie et des travaux confiés à des artisans locaux.
Pourtant, la commune ne peut autofinancer le projet. Contrairement à d’autres pionnières des yourtes scolaires, elle doit solliciter des aides. La DETR (Dotation d’Équipement des Territoires Ruraux) est d’abord refusée. Après un entretien du maire auprès du sous-préfet avec l’accompagnement d’un sénateur du département, le Préfet octroie une aide DSIL de 26 000€. La Région ne peut pas activer son Bien Vivre en Bretagne car la yourte est jugée non pérenne, bien que le projet réponde aux objectifs visés par ce dispositif.
Les politiques publiques évoluent mais pas les mécanismes de financement, ce qui crée un décalage préjudiciable aux projets innovants.
Catherine Livebardon, adjointe aux affaires scolaires
Quant aux aides départementales via les Contrats de Territoire, la commune pense d’abord candidater sur la ligne « bâtiment public ». Le Département lui suggère plutôt la case « innovation » et lui octroie 16 000€ (compte tenu de la baisse des dépenses finales, la subvention sera finalement de 11 200€).
Un financement privé pour un service public ?
Pour combler le reste à charge, la commune tente une démarche rare pour une collectivité : lancer une campagne de financement participatif via la plateforme Kiss Kiss Bank Bank. Une centaine de contributeurs permettent de récolter 8 200 € entre juin et octobre 2024.
Cette initiative est saluée par beaucoup, mais aussi source de débats. Le recours à des dons citoyens pour un service public interroge, tout comme la façon dont les financeurs publics intègrent ce type de ressource dans les plans de financement. Le Département, après étude juridique, considère ces fonds non comme de l’autofinancement mais comme un financement complémentaire, ce qui a eu un impact à la baisse sur sa propre subvention. « Pourtant, une commune peut recevoir des dons défiscalisables de la part de citoyens. On le voit parfois dans le cadre d’un héritage par exemple. C’est dommage que dans notre cas, le financement participatif ne soit pas considéré comme tel » regrette le maire.
La mise en place de la yourte scolaire
L’architecte Adrien Alanou est missionné pour le permis de construire. Enseignant à l’école de Condé à Rennes, il fera même de la yourte un support pédagogique avec ses élèves. Son regard d’architecte permet également d’appréhender plus largement l’intégration de la yourte dans le paysage environnant. Le PC est instruit par la préfecture, la commune étant encore sous RNU. Il est délivré de façon provisoire pour 36 mois mais pourra être reconduit.
Il faut aussi respecter la réglementation ERP (Établissement Recevant du Public). »Pourtant, il n’y a pas eu de formalités particulière compte tenu qu’il s’agisse d’une yourte. Tout autre ERP aurait demandé les mêmes attentions » constate Pierre-Yves Daniel. ainsi, le SDIS valide les conditions de sécurité, notamment les risques incendie. Une attestation de conformité de prise en compte des risques sismiques est également requise.
La yourte de 68 m² est installée début 2025 dans le prolongement de la cour d’école, sur un terrain constructible. Le chantier est rapide : quelques semaines pour les travaux de terrassement (janvier), l’installation (première semaine de février), l’électricité (deuxième semaine de février) et les aménagements intérieurs/extérieurs (mars). Deux radiateurs électriques sont installés, ainsi qu’un extracteur hygro-variable pour la ventilation.
Caractéristiques techniques de la Yourte Française
A cela s’ajoute 10cm de ouate de polyester pour l‘isolation phonique.
Le retour d’expérience
Depuis avril 2025, les dix-sept élèves de CP-CE1-CE2 occupent cette nouvelle classe insolite. Les premiers retours sont positifs : environnement chaleureux, espace fonctionnel, bien intégré à l’école. Seule ombre au tableau : la chaleur en période estivale, due à l’accumulation d’air chaud au sommet de la yourte et à une exposition sud. Une avancée de toit et une meilleure extraction sont à l’étude.
Pour l’hiver, le confort thermique sera observé dans les prochains mois. Mais pour le maire, c’est déjà une réussite : « La yourte présente une empreinte carbone bien inférieure à une construction traditionnelle et n’entraîne aucune artificialisation des sols. »
Les éléments financiers
Coûts 64.7K€
- Yourte 50.4K€
- 5.7K€ VRD
- 5.1K€ aménagement
- 3.5K€ MO
Subventions
- 26K€ DSIL
- 11.2K€ CD22
- 8.2K€ financement participatif
- 19.3K€ autofinancement
Contacts
- Pierre-Yves Daniel, maire
- Catherine Livebardon, adjointe aux affaires scolaires
Rédigé en août 2025