Face au recul du trait de côte, Penvénan (22) anticipe l’inéluctable en faisant preuve de résilience

Infos pratiques

Adhérent depuis 2006

Téléphone : 02 96 92 67 59
Nbre d’habitants : 2434
Superficie : 19 km²
Intercommunalité : Lannion-Trégor Communauté
www.ville-penvenan.fr
Contact BRUDED : Cécile Jamoneau

Autres expériences de Penvénan

La commune de Penvénan mène un travail de fond pour anticiper le recul du trait de côte : une stratégie conciliant données scientifiques, acceptation sociale et adaptation progressive sur fond de tensions foncières, d’enjeux touristiques et de bouleversements environnementaux.

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Avec ses 11 km de côtes, ses plages, ses zones humides, ses petits ports et ses hameaux dispersés, Penvénan – 2 500 habitants sur la côte trégoroise – est concernée de plein fouet par l’érosion de son littoral. Ce phénomène s’est accéléré au fil des années : plu­sieurs tempêtes majeures entre 2010 et 2024 ont entraîné des reculs de plusieurs mètres dans certains secteurs, comme le camping municipal des Dunes, particulièrement exposé.

En parallèle, l’État demande dès 2014 le classement des digues et la réalisation d’études de danger, tandis que la compé­tence GEMAPI portée par l’EPCI ne couvre pas l’intégralité des ouvrages jugés vulnérables. Penvénan décide de répondre à un appel à projets du CEREMA sur l’élaboration d’une stratégie pilote d’anticipation et de ges­tion du recul du trait de côte. A noter en outre que la richesse géomorphologique du littoral penvénanais (vasières, cor­dons dunaires, plateaux rocheux, falaises, etc.) en fait un formidable territoire pilote pour élaborer une stratégie d’adaptation.

Une stratégie progressive

Lancée en 2020, cette straté­gie s’est construite sur quatre années de travail, comprenant :

  1. Un diagnostic territorial basé sur des relevés de terrain, des études scientifiques mais aussi sur des éléments issus de la mémoire locale (plans napoléo­niens, cartes postales anciennes, photos de famille…) ;
  2. Une mobilisation des citoyens (habitants, associations et usagers) à travers la collecte de données et la participation à des groupes de travail. Les enfants ont été associés à travers des projets pédagogiques comme le marquage au sol du possible futur niveau de la mer ;
  3. Une hiérarchisation des enjeux : les secteurs les plus sensibles ont été identifiés (che­mins côtiers, campings, ports, secteurs urbanisés) et croisés avec les projections d’évolution à 2050 et 2100 ;
  4. Des orientations différenciées selon les zones, plusieurs options ont été retenues : laisser-faire, entretien minimal des ouvrages, relocalisation planifiée. Or ouvrages gérés dans le cadre de la GEMAPI, la commune décide de classer l’ensemble de ses ouvrages  » non pérennes ». Toutefois, tant qu’elle pourra les entretenir techniquement et financièrement, elle le fera. En 2025, le budget alloué à l’entretien des ouvrages maritimes est de 65 000€.

La commune a décidé de ne pas considérer les ouvrages de défense contre la mer comme pérennes, mais continuera à les entretenir tant que cela sera techniquement et financièrement possible. Je préfère informer et protéger la population mais surtout ne pas augmenter le risque.

Denise Prud’homm, maire

La communication et l’implication de tous

Un comité de pilotage a associé les quatre listes du conseil municipal, les services techniques de la commune, des représentants de l’État (DDTM), l’Agence de l’eau, le CEREMA, ainsi que des asso­ciations environnementales, des pêcheurs, des randon­neurs et des habitants.

Chaque étape du projet a fait l’objet de comptes rendus publics (site internet de la mai­rie). Des réunions publiques ont permis d’informer la population, en particulier en période estivale, avec l’appui d’une grande pancarte péda­gogique.

Penvénan s’est vue remettre le prix ter­ritorial résilience 2023 pour son travail de sensibilisation sur l’évolution du trait de côte par le ministère de la transition écologique.

Relocaliser, adapter ou laisser faire ? Trois voies pour agir

Dans les secteurs identi­fiés comme vulnérables, trois options vont être proposées aux 604 habitants et propriétaires enquêtés via un questionnaire diffusé en juillet 2025 :

  • Se défendre individuellement, ou collectivement au sein d’une association de propriétaire, en construisant à leurs frais des protections contre la mer (cette possibilité est prévue par l’article 33 de la loi du 16 septembre 1807) ;
  • S’adapter, en aménageant les logements pour limiter les dégâts en cas d’inondation (rehaussement, pièces de vie à l’étage, etc.) ;
  • Adhérer à une stratégie de relocalisation, en quantifiant les surfaces nécessaires pour un éventuel déplacement des habitations et activités vers des zones plus sûres. Charge à la collectivité ensuite de chercher le foncier pour relocaliser.

Deux campings sont directe­ment concernés par une éven­tuelle relocalisation. Mais là encore, les obstacles sont nombreux : terrains situés en zone humide ou zone remar­quable, contraintes de conti­nuité urbaine et la rareté du foncier. Le soutien de l’EPF, du CEREMA, de la région Bretagne et de la DDTM est mobilisé pour accompagner ces démarches. Mais que faire des structures qui doivent nécessai­rement rester sur le littoral, à l’instar du centre nautique ? On cerne ici toute la complexité de la situation : superposition des réglementations d’urbanisme, contraintes d’usages, préserva­tion de la biodiversité, du patri­moine, du paysage… En outre, le plan communal de sauve­garde, bien qu’utile lors de la tempête Ciaran, devra aussi être actualisé pour intégrer les nouveaux risques. Le CCAS a été mobilisé pour repérer les publics les plus vulnérables.

Un héritage à transmettre

À quelques mois du renouvelle­ment des équipes municipales et communautaires, les élus actuels souhaitent transmettre cette démarche comme un héri­tage politique à poursuivre. Car pour les élus comme pour les habitants, la transition est nécessaire. En résumé, leur message est clair :

  • Agir dans la mesure du raisonnable ;
  • Ne pas lutter contre les éléments naturels ;
  • Protéger les populations et préserver le patrimoine.

Il faut agir maintenant, ne pas attendre d’avoir les pieds dans l’eau pour réagir.

Denise Prud’homm

Du local au collectif : l’action de Lannion-Trégor Communauté

De son côté, Lannion-Trégor Communauté (LTC) – 38 communes dont 27 communes littorales sur 250 km de côtes – amorce une transition d’une approche strictement communale à une stratégie communautaire de gestion du recul du trait de côte…). Elle se sert de l’expérience de Penvénan – première commune du territoire à intégrer le décret national identifiant les zones exposées à l’érosion – comme point d’ancrage pour favoriser l’élargissement progressif de la démarche.

Un groupe de travail réunissant les communes côtières s’est constitué, d’abord autour des enjeux liés à la qualité des eaux de baignade, puis plus largement autour de la fragilité du littoral, des tensions entre fréquentation touristique et préservation, et de la montée des risques. Progressivement, 20 communes se sont portées volontaires pour figurer dans le décret établissant la liste des communes dont l’action en matière d’urbanisme et la politique d’aménagement doivent être adaptées aux phénomènes hydrosédimentaires entraînant l’érosion du littoral. Mais au-delà de cette liste, LTC a choisi d’intégrer l’ensemble de son linéaire côtier dans une démarche globale.

Une cartographie détaillée du recul du trait de côte a ainsi été réalisée sur l’ensemble du territoire, qu’il soit ou non inscrit dans le décret. Intégrée au PLUi-H en cours d’élaboration, l’outil cartographique permet d’identifier les zones à risque et de poser un cadre réglementaire (emplacements réservés, zones d’inconstructibilité) tout en rendant visible la problématique dans le débat public.

Sur la base de scénarios à 30, 50 et 100 ans, les données sont préoccupantes : 1000 ouvrages recensés, 475 logements et de nombreuses infrastructures publiques concernées à court terme. Des tensions apparaissent, notamment du côté des particuliers ou des professionnels de l’immobilier, face aux zones d’inconstructibilité ou aux incertitudes juridiques. Un travail d’explication, de concertation et de construction juridique est en cours.

Aujourd’hui, LTC s’engage dans l’élaboration de cette stratégie communautaire, avec l’appui de financements (fonds européens, fonds vert) et en lien étroit avec les communes. L’enjeu est double : identifier les ouvrages à maintenir ou à laisser évoluer, et définir qui – collectivités ou particuliers – en aura la charge. Cette démarche a pu voir le jour grâce à la confiance construite entre élus et à une volonté commune de faire face collectivement à un enjeu de long terme.

On n’est pas encore au bout mais tout cela a déjà été possible parce que les élus avaient confiance les uns envers les autres grâce à ce groupe de travail des communes littorales.

Annie Bras-Denis, vice-présidente à l’environnement de Lannion-Trégor Communauté

CONTACTS

 

Rédigé en octobre 2025

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